한국국제교류재단

Fidèle à son prénom, qui signifie littéralement « héros » en coréen, Lim Young-woong a accompli un parcours des plus exemplaires. Natif de Pocheon, une petite ville de montagne située dans le nord-est de la province de Gyeonggi, le jeune homme allait connaître des débuts difficiles et devoir surmonter maints obstacles, ce à quoi ne pouvaient qu’être sensibles les Coréens de toute génération et de toute origine sociale.

Une vie héroïque se déroule souvent selon un certain schéma commençant par une naissance dans certaines circonstances suivie de la survenue d’épreuves, de la rencontre d’un mentor et, enfin de la réussite face à des difficultés dont le vainqueur sort grandi. Si les étapes qu’a suivies Lim Young-woong ne correspondent pas exactement à ce modèle, elles en comportent de nombreux éléments.

Alors qu’il n’avait que cinq ans, le chanteur a été frappé par un premier drame quand son père est mort dans un accident de la route, ce qui allait en outre plonger sa famille dans une grande précarité. Grâce au réconfort que lui procure l’amour de la musique, le jeune garçon sera en mesure d’affronter ces temps difficiles et trouvera dans chaque écueil rencontré une chance d’évoluer dans le bon sens. Au cours de sa carrière musicale, le passage du genre de la ballade à celui du trot et la participation à des concours de chanson télévisés représenteront aussi des défis qui lui serviront de tremplin pour aller de l’avant.

Affiche du film IM HERO – THE STADIUM, qui montre le chanteur Lim Young-woong en concert.
© Mulgogimusic, CJ ENM

Résolu à voir se réaliser son rêve de chanter, Lim Young-woong multipliera les emplois précaires à l’usine, dans des restaurants, supermarchés ou supérettes pour des salaires ne dépassant pas 300 000 wons par mois, soit environ 215 $. À ses débuts dans la chanson, cherchant toujours à subvenir à ses besoins et à rendre sa situation plus stable, il ira jusqu’à tenir un stand de patates douces rôties dans la rue.

C’est en 2016 qu’il débutera sa carrière en enregistrant un single numérique de trot intitulé Hate You. Dès l’année suivante, il entreprendra de se faire mieux connaître du public en participant à l’émission matinale AM Plaza de la chaîne de télévision KBS1 TV, où il remportera cinq victoires dans la catégorie « Challenge ! Dream Stage ». Quatre années s’écouleront encore jusqu’à cette émission Mr. Trot de la chaîne TV Chosun qui le couronnera d’un succès d’envergure nationale.

Les concours de la chanson étaient alors un rendez-vous à ne pas manquer au petit écran car, en ces temps de pandémie de Covid-19, ils s’avéraient salutaires en permettant aux Coréens d’oublier leurs soucis. Artiste au vécu difficile et sans la moindre prétention, Lim Young-woong possédait le profil idéal pour attirer l’attention du public.

En comparaison de la gestuelle théâtrale et des grimaces de douleur dont abusaient souvent les chanteurs traditionnels de trot, le style d’interprétation de Lim Young-woong, par sa sobriété, semble être du registre de la conversation. Oscillant avec subtilité entre calme et retenue, le chanteur livrait des interprétations pleines de spontanéité qui avaient le pouvoir de rassurer en dissipant les incertitudes de l’époque. En lice dans le concours de la chanson Mr. Trot, il fera forte impression avec sa reprise de The Traitor, cette chanson de 1969 alors chère à son défunt père et les téléspectateurs, touchés par l’émotion et la nostalgie qui s’en dégageaient, seront emportés par un grand élan de sympathie envers le chanteur. Cette prestation mémorable vaudra à celui-ci de remporter haut la main le titre tant convoité, puisqu’il recueillera 25 % des suffrages exprimés en temps réel par près de huit millions de téléspectateurs.

Pas plus tard que l’année suivante, Lim Young-woong accomplira un véritable exploit en se classant premier au concours de l’émission Show ! Music Core diffusée par la chaîne MBC en interprétant le titre My Starry Love, chose des plus rares pour ce genre particulier s’agissant d’une émission plutôt destinée à un public jeune.

L’artiste n’allait pas s’arrêter en si bon chemin et ses interprétations sur la grande plateforme coréenne de streaming Melon allaient donner lieu à dix milliards de streams, un chiffre qui l’a placé au deuxième rang dans ce domaine, derrière le célèbre groupe de K-pop BTS, et qu’il a été le premier à atteindre en solo. Il battra aussi un record en remportant le Gold Play Button de YouTube après avoir franchi le cap du million d’abonnés sur sa chaîne, ce qui représentait une première pour un chanteur de trot. Au septième art, son concert filmé IM HERO – THE STADIUM, sorti l’année passée sur les écrans, attirera pas moins de 357 858 spectateurs et consacrera son succès sur la scène musicale. Dans un sondage réalisé par la chaîne Star News en partenariat avec l’institut de sondages Gallup Korea, il se placera en tête des « chanteurs de trot préférés du 21e siècle ». La réussite phénoménale à laquelle il est parvenu avec le soutien d’un fandom nombreux et enthousiaste fait sa particularité par rapport aux autres artistes du genre.

Contrairement aux héros de la mythologie, qui disposaient de pouvoirs surnaturels, ceux d’aujourd’hui, à l’instar de Lim Young-woong, n’accèdent à ce statut qu’à force de dévouement passionné pour leur public et leur travail. Dans le cas du chanteur, c’est une alliance de talent, de simplicité et de sincérité qui a exercé son charme sur l’imaginaire collectif et les doutes qui pouvaient subsister quant à la continuité de son succès se dissipent aujourd’hui au vu du nombre croissant de ses admirateurs.

Désormais forte de plus de 200 000 membres, la communauté que forment les fans de Lim Young-woong, dite Hero Generation, lui témoigne une fidélité tout aussi indéfectible que celle des fans des idoles de la K-pop. Ce fandom a la particularité de rassembler différentes générations, mais des femmes d’une cinquantaine ou d’une soixantaine d’années en font surtout partie, car elles y trouvent une raison de s’investir pour combler un vide quand « les oisillons ont quitté le nid », ainsi qu’un exutoire à leurs émotions en la personne du chanteur.

Parmi ces admirateurs, nombreux sont ceux qui affirment être moins sujets à la dépression ou à l’insomnie depuis qu’ils participent aux activités de cette communauté. D’autres, qui souffraient de leur isolement, voire avaient perdu le goût de la vie, déclarent même avoir redonné un sens à leur existence au contact de personnes se trouvant dans la même situation et formant maintenant avec elles des communautés dynamiques. Ce passage de la solitude à la solidarité, qui allait leur permettre de tourner une page de leur vie et d’avancer, révèle donc que l’apport réalisé par Lim Young-woong, loin de se limiter à la musique, exerce un effet bienfaisant sur la santé mentale de ces admiratrices d’âge moyen et, au-delà, sur l’harmonie qui règne au sein de leurs familles, ce qui constitue en soi une réussite de taille.

En mai 2024, le concert mémorable qu’a donné Lim Young-woong au stade de la Coupe du monde de Séoul a rassemblé près de 100 000 de ses fans, qui se réclament de l’appellation Hero Generation.
© Mulgogimusic, CJ ENM

En outre, cette influence bénéfique ne s’arrête pas aux seules fans de cet artiste, puisque celles-ci apprécient également d’autres chanteurs et construisent, avec des femmes qui partagent leur ferveur, des liens d’amitié solides et une réelle solidarité résultant de cette passion commune. Par rapport aux communautés de fans des autres artistes des genres coréen du trot ou de la ballade, celle de Lim Young-woong se distingue par son ampleur exceptionnelle.

Si ce dernier se singularise, dans une certaine mesure, par son parcours de vie admirable, son répertoire et son interprétation empreinte de modestie sont tout aussi appréciés de ses admirateurs. Des titres tels que Trust in Me (2002) ou My Starry Love (2021) se caractérisent par l’absence de toute référence explicite à une figure masculine et ce parti pris, en se conjuguant avec une interprétation empreinte de douceur et de sincérité, évoque une virilité apaisée qui exerce davantage d’attrait sur le public.

En outre, les fans de Lim Young-woong s’affirment désormais en tant que force de changement social par différentes initiatives philantropiques et actions de bénévolat. Cette démarche charitable se place au service de causes variées allant de l’autonomie des jeunes au soutien aux familles touchées par le handicap ou aux enfants atteints de cancers. Par leurs dons et leur engagement constant dans un cadre communautaire, ils témoignent de la capacité à porter le changement qui peut être celle d’une communauté de fans convenablement organisée.

Le talent de Lim Young-woong, ses qualités humaines et les récits encourageants qu’échangent ses admirateurs participent tous du même message universel, à savoir que la vie vaut la peine d’être vécue et qu’il n’est de difficulté qui soit insurmontable. En s’étendant par-delà les frontières, sa renommée envoie un signe d’espoir à tous ceux qui aspirent à donner un nouveau cap à leur existence.